CINQUANTE ANS DE LA REVUE RÉSURRECTION 

Luc PERRIN

Le Père Gitton ne m’a pas demandé de présenter l’histoire de Résurrection, car il y a des gens plus compétents que moi qui auraient très bien pu le faire : Samuel Pruvot a entamé d’ailleurs ce travail avec son mémoire sur les débuts (la première série) de la revue et du mouvement. Rappelons, à cet égard, que le mouvement est antérieur à la revue. Samuel Pruvot montre que, dès 1954, le Père Charles constitue une sorte de communauté, communauté dont la revue devient une des expressions en 1956. Sans doute par malice bienveillante, si je puis dire, le Père Gitton a fait appel à quelqu’un qui n’est pas de la tribu ; je ne suis pas de Résurrection, même si les curieux trouveront un petit article signé par moi en 1998. Je viens d’un univers, l’université de Strasbourg et sa Faculté de Théologie catholique d’État, que les participants de la deuxième série de numéros, celle qui démarre en 1968, ne devaient pas beaucoup apprécier. Les choses changent, puisque j’ai aujourd’hui comme collègues Françoise Vinel, qui fut une collaboratrice de la revue Résurrection entre 1971 et 1978, ainsi que le Père Philippe Vallin, de l’Oratoire de Nancy, collaborateur de la revue dans la troisième série. 

J’ai à parler en tant qu’historien. Quand on est dans le monde de Résurrection, c’est un terme qui suscite d’emblée la réserve. Cette réserve vis-à-vis de l’Histoire proprement dite demeure en filigrane, malgré la présence plus affirmée d’historiens à partir de 1985 : Michel Emmanuel, Samuel Pruvot, Paul Airiau ici présent, Jean Chaunu et son épouse Charlotte Le Bouteiller, que l’on voit investir petit à petit la revue, sans qu’elle devienne pour autant une revue d’historiens. D’où vient cette méfiance presque intrinsèque qui traverse cinquante années d’histoire de la revue Résurrection ? Elle s’enracine à mon sens dans un rejet de l’historicisme, historicisme qui vient lui-même en droite ligne de la crise moderniste, cette crise dont Émile Poulat n’a eu de cesse de souligner le caractère durable au long du XXe siècle. Il importe de rappeler que Maxime Charles n’a pas réprouvé l’encyclique Humani generis de 1950, qui a pourtant causé quelques ennuis à des hommes qui lui étaient chers, comme le Père de Lubac s.j. En effet, l’axe principal d’Humani generis est la condamnation de l’historicisme, un point qui a été peu relevé mais que Jean-Paul II dans l’encyclique Fides et ratio (1998) a repris, en citant explicitement Humani generis (1950). 

Trois étapes et une continuité

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