RESURRECTION 10 (1er trimestre 1959) : LA MORT ET LA RESURRECTION

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SOMMAIRE

Maxime CHARLES

Liminaire

Pages  1 à 7

Pierre COLIN

Qu’est-ce que mourir ?

Pages 8  à 16

Jean-François LEMARC

Bernanos affronté à la mort

Pages  17 à 21

Léon NOEL

Mythes de résurrection

Pages  22 à 24

Etienne HAMEL

Vie nouvelle ou vie sans fin ?

Pages 25 à 29

Elie PASCAL

La mort dans la Bible

Pages  30 à 41

Pierre MALLET

Historicité de la Résurrection

Pages 42  à 46

Michel COLONI

Les témoins de la Résurrection sont-ils valables ?

Pages 47  à 50

Jean DANIELOU, s.j.

Spiritualité de ressuscités

Pages 51  à 54

H.-I. DALMAIS, o.p.

La Résurrection dans les liturgies orientales

Pages  55 à 59

Michel HAYEK

La seconde Parousie

Pages 60  à 75

Robert FULLOT

Ce qui est déjà ressuscité

Pages 76  à 92

Livres à lire

Pages  93 à 95

Quantité
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Liminaire

La Résurrection est un mystère particulièrement d’actualité. Beaucoup de chrétiens, par peur du manichéisme, c’est-à-dire de l’hostilité ou de l’indifférence à l’égard d’un monde considéré comme mauvais en son fond, mettent aujourd’hui l’accent sur la nécessité de s’y engager, de s’incarner ou, plus théologiquement, d’assumer tout le créé. Mais il leur arrive parfois d’être eux-mêmes séduits par le monde et de justifier leur attitude en distinguant trop concrètement deux domaines dont l’un serait celui des relations avec Dieu et l’autre de l’insertion dans le monde, ou bien de considérer que par son Incarnation, le Verbe a donné valeur à toute activité humaine sans qu’il soit besoin d’aucune opération personnelle pour les référer à Dieu. Or, cette nécessaire assomption du monde par le chrétien est fort bien assurée et sans aucun danger par la Résurrection. Celle-ci suppose évidemment une mort, c’est-à-dire le sacrifice de tout ce qui s’accompagne de l’oubli ou du refus de Dieu, mais elle est la restauration de toutes choses en l’union retrouvée avec Dieu.

Il est vrai qu’à partir d’un accord sur ce nouveau régime de relations entre Dieu, l’homme et le monde, on peut de nouveau mettre l’accent de façon différente : les uns sur la nécessité de l’union à Dieu par le sacrifice du créé, et les autres sur la nécessité de prolonger cette union retrouvée dans la création toute entière. Mais ce n’est plus alors que question de pédagogie, et chacun la règlera en s’interrogeant pour savoir quelle est la tentation majeure de sa propre vie ou de son milieu chrétien : s’évader vers un Dieu sans relation avec le monde ou, au contraire, s’enivrer de ce monde jusqu’à l’oubli de Dieu.

En ces lignes préliminaires, on trouvera plutôt l’enchaînement des problèmes que l’on peut soulever à propos de ce mystère capital qu’une synthèse que seules rendront possible la lecture attentive des articles de tout le numéro et, pour beaucoup, les longues méditations de la route du prochain pèlerinage de Chartres.

Les faits

L’homme s’interroge sur sa propre souffrance et ce oint en laquelle elle culmine : la mort. Il ne voit pas en cette dernière seulement le terme trop avancé d’une vie brève, mais la certitude qu’il n’achèvera pas sa tâche et qu’il n’atteindra pas les buts qu’il s’était assignés. Il la rencontre chaque jour en sa propre vie comme une sorte de dissolution déjà commencée en chaque occasion manquée, en chaque constatation de ses propres limites, en chaque maladie. Une double visée, l’une philosophique (M. Colin), une autre littéraire (J.-F. Lemarc) conduisent ici cette réflexion, non sans orienter déjà vers les solutions.

L’homme a d’ailleurs essayé de répondre par lui-même à cette angoissante question, et Léon Noël rappelle l’importance des mythes de mort et de Résurrection dans l’histoire des religions. Mais, avec Simone de Beauvoir, dont le P. Hamel présente ici le roman, Tous les hommes sont mortels, il comprend que le prolongement indéfini de la vie, telle qu’il la connaît, ne saurait le satisfaire. La Bible, avant de donner une solution, offre une explication : c’est le péché, rupture avec Dieu, qui est à l’origine de la mort. Elie Pascal rappelle ici l’expression éloquente de cette vérité.

En face de ce bilan négatif éclate la bonne nouvelle : il est une homme qui est ressuscité des morts et qui a vaincu définitivement la mort. Il n’a pas prolongé la vie ordinaire mais il l’a transformée et, par ce fait même, il est capable de donner totale satisfaction à ceux qui veulent être autrement, mieux et toujours.

Mais, est-ce vrai ? Certes, l’adhésion efficace à cet Homme-Dieu est celle d’une personne qui accueille une autre personne agissant profondément en elle par la grâce, elle réclame la participation de tout l’être ; elle est un acte de foi mais elle doit aussi résister victorieusement au contrôle de la raison. Le P. Mallet évoque la source de cette étonnante affirmation dans la prédication apostolique ; le P. Coloni la soumet à une critique exigeante.

Dialectique de la Résurrection

L’homme aime la vie ; il hait la mort. Dieu est tout à fait d’accord : Il aime la vie humaine puisqu’Il l’a créée, Il hait la mort puisque, par un privilège singulier, Il en avait exempté cette créature destinée à l’union avec Lui. Dieu n’a pas failli à son dessein, c’est l’homme qui, en refusant cette union, qui est jonction de sa volonté avec celle de Dieu, s’est livré à la mort. Dieu dans son amour ne l’a pas abandonné. Considérant l’incapacité de l’homme à revenir à Lui, et ne pouvant le rétablir dans l’union avec Lui sans un mouvement de sa liberté, Il a envoyé son Fils. Dans son humanité, Jésus-Christ a subi les conséquences du péché, mais Il a compris les raisons de cette nécessaire consécution, Il l’a accepté et a ainsi rétabli l’accord de la volonté humaine avec la volonté de Dieu. Par le fait même, Dieu a pu déployer en cette humanité, de façon totale et définitive, les richesses de sa puissance et de son amour. Le Christ a retrouvé la vie, et une vie douée d’une plénitude physiologique et psychologique absolument nouvelle comme le montrent les apparitions. Dans cet état, Il a pouvoir sur tout le créé et peut restaurer tous les autres hommes qu’Il s’agrège en un corps dont Il est la tête. Mais ceux-ci ne profitent pas de sa résurrection d’une façon passive, à la manière de choses qui seraient transformées. C’est en cédant à la sollicitation externe et interne de Dieu pour joindre à la tour leur volonté à la sienne, c’est en consentant comme le Christ aux arrachements douloureux et nécessaires jusqu’à la mort incluse, qu’ils participent à sa Résurrection.

Cette dialectique, le P. Bouyer l’a décrite minutieusement dans « Le Mystère Pascal » et l’a affrontée aux problèmes de ce temps dans « Humain ou Chrétien ? ». dans ce numéro, le P. Daniélou a bien voulu en reprendre les principales perspectives, toutes orientées par St Paul et les Pères grecs. Le P. Dalmais la montre chantée et priée dans les liturgies orientales.

Etapes de la résurrection de l’homme

La lente réalisation du vouloir divin, ses moments successifs, étonnent toujours. De fait, si on considère les choses du côté de Dieu, et c’est ce que fait parfois l’Ecriture en des formules tranchantes qui laissent croire que tout est fait, on ne comprend aucun retard ; mais si on regarde du côté de l’homme et si on se souvient que Dieu veut l’attirer à Lui et lui donner ses véritables dimensions sans le bousculer, en acceptant son rythme de créature et en tournant délicatement ses refus, on comprend qu’il y ait une histoire du salut.

Dans la vie de chaque homme, deux temps essentiels la marquent. Le Baptême dans lequel il ressuscite, comme saint Paul et les Pères grecs ne cessent de le rappeler, et le jour de la Parousie où il ressuscitera, comme le montre le P. Hayek, qui étend d’ailleurs sa réflexion à l’entre-deux historique de ces deux moments essentiels. Pour chaque homme pris individuellement, celui-ci correspond à son passage sur la terre. R. Fullot se demande en quoi la situation de cet homme nouveau mais non encore pleinement ressuscité est originale. On pourrait y ajouter des réflexion sur la situation du chrétien entre sa mort charnelle et sa résurrection, en sondant la tradition de l’Eglise dans le rituel de l’extrême-onction, du viatique, des funérailles, et aussi dans le pontifical des cimetières, comme d’ailleurs dans l’antique vénération des Saints.

Tout, dans cette histoire, est mouvement et combat de la chair et de l’esprit, c’est-à-dire puissance de Dieu à l’action dans l’homme qui hésite à mourir complètement pour ressusciter totalement.

On peut formuler trois sortes de conclusions :

1° Il n’y a pas dans la résurrection de problème théologique particulier au corps. Celui-ci a participé au péché mais il a été pour le Christ un instrument de rédemption ; il est restaurable à travers les mortifications librement consenties durant la vie mortelle ; il reçoit immédiatement les sacrements du Christ dont l’un (le mariage) sanctifie une de ses opérations spécifiques ; il est destiné à une nouvelle existence de nature mystérieuse et qui sauvegarde son identité.

2° L’action du chrétien dans le monde, celui de la nature comme celui de la société humaine ne saurait être qualifiée en elle-même. Elle dépend essentiellement de l’état religieux du chrétien. Le monde n’est mauvais que lorsque l’homme qui agit sur lui croit qu’il peut être pour lui une fin et que dans cette action il oublie Dieu ; mais le monde ne prend valeur que lorsqu’un chrétien uni à Dieu le pense, l’organise selon le plan et en référence à Dieu. C’est ainsi que lui aussi participe à la résurrection et se soumet à la Seigneurie du Christ. (Cf le P. Bouyer « Humain ou Chrétien ? » et le P. Daniélou « Sainteté et Action Temporelle ».)

3° Le Christ est ressuscité. Tout peut être sauvé. Il ne faut rien rejeter comme essentiellement mauvais, mais il ne faut rien vouloir de façon séparée de Dieu. L’extension de la résurrection du Christ aux hommes dépend de la connaissance qu’ils en ont, du consentement qu’ils y apportent, de l’orientation de leur volonté dans le sens de celle du Christ. Cela comporte d’accepter les moyens que le Christ a employés. Il est permis de craindre la mort parce qu’elle est douloureuse, puisque le Christ l’a crainte, mais il faut aussi la vouloir et même l’aimer puisqu’elle est le seul moyen pour joindre Dieu malgré le péché et ses conséquences.

Le chrétien qui sait toutes ces choses tire de sa foi un dynamisme accru dans tous les domaines dont aucun ne saurait échapper par la médiation de son amour à la puissance de la Résurrection. Il possède aussi une grande joie, puisqu’il sait d’avance que la victoire est acquise. Il contemple cette dernière comme en sa source dans le Christ ressuscité ; mais il la voit avec une complaisance fraternelle dans son premier effet définitif : la Vierge Marie élevée jusqu’à l’intimité divine dans la totalité de sa réalité humaine.

Maxime CHARLES

Res10
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